A peine quelques jours passés à Nuku Hiva que nous voilà déjà repartis pour une traversée de 5 jours vers Tahiti.
11 mai
Nous pensions passer du temps aux marquises mais l’impossibilité de se déplacer d’île en île en raison du virus et surtout le fait que Loup, mon fils, ne puisse venir nous y rejoindre, nous a contraints à reprendre la mer. Petit moral pour l’équipage encore fatigué par cette longue traversée depuis l’Alaska.
Ici aux Marquises, la moindre pierre est vivante, les Tikis parlent et bougent lorsqu’on les regarde avec un peu d’attention. La nature exulte, les mangues juteuses recouvrent les pistes et les falcatas dansent dans le ciel bleu qu’ombrage quelques gros cumulus couleur d’ébène prêts à déverser leurs ondes bienfaisantes.
La mer ondule jusqu’à l’infini, a longtemps l’observer, on distingue toujours un souffle de baleine ou un aileron de requin. Un poisson volant bondit et fait frétiller la surface de l’eau tandis que quatre raies mantas font le tour de Fleur Australe. Les huîtres regorgent de perles précieuses et l’air à la suave fragrance de la fleur de Tiaré, sa jolie robe blanche en étoile, orne les cheveux des vahinés et dispense dans leurs sillages des effluves enchantées.
La nature nous enveloppe et nous la remercions chaque jour de subvenir à nos besoins. Chaque parcelle de cette terre rouge et nourricière nous émerveille, nous vibrons au rythme de ses secrètes palpitations.
12 mai
La nuit a été rude, la mer est grosse et nous sommes chahutés. Les îles Marquisiennes se sont effacées dans notre sillage lentement, comme autant de perles rares émergées des abimes. Les pics de basalte dressés vers le ciel tels des phallus gonflés de désir ont persisté longtemps dans l’éclat de la lune gironde.
Ce matin les lames sont désordonnées, emmêlées, elles nous assaillent sans discontinuer et nous subissons sans broncher. La mer se creuse, la lumière m’aveugle, elle galope sur la mer, s’attache en son sommet, pénètre dans ses veines, inonde ses entrailles, elle donne vie à un tourment au flux incertain nourri des abysses et rassasié de ciel. Nos voiles sont en ciseaux, comme un grand papillon qui aurait déployé ses ailes pour mieux butiner le creux des vagues, il emporte un peu de son sel à chaque battement, il hume ce parfum rare qui perdure dans son sillon, se noie dans l’horizon, à la lisière du ciel et de la mer, là où tout s’arrête.
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