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  • Photo du rédacteurGéraldine Danon

17 mars : Valdez

Ce nom résonne tristement dans ma mémoire. Il est lié à la plus grande marée noire

américaine survenue en mars 1989.



La faute revient au capitaine du tanker Exxon Valdez qui a passé sa soirée à boire. Alors qu’il sortait du Fjord avec ses cales remplies de l’or noir acheminé du nord de l’Alaska par un immense pipeline, le capitaine voit devant son étrave un petit iceberg échappé du Columbia glacier. Il donne l’ordre à son second de dévier la route et s’éclipse dans sa cabine, cuver son vin. Le capitaine ne réapparait pas et le second ne rétablit pas le cap, une fois l’obstacle passé. Le tanker s’éventre sur un récif et laisse s’échapper de ses cales quelques 41 millions de litres de pétrole qui souillèrent 2500 km de côte. Une catastrophe écologique, 500 000 oiseaux, 2800 loutres, 20 orques, 300 otaries, des milliers de poissons, meurent. Aujourd’hui il reste encore quelques traces de ce désastre et seules certaines espèces ont parvenu à retrouver leur équilibre.



Nous passons au large de ce triste récif et le vent monte en puissance. Plus de 30 nœuds de vent contraire. La Fleur lutte, tire des bords et gagne lentement vers le port. Le décor des hautes montagnes qui plongent dans la mer est resté vierge et resplendit

L’entrée dans le port est tendue. Le vent souffle de plus en plus fort, une fine couche de glace s’est formée à l’entrée du port, elle fait craquer la mer que Fleur Australe tranche bravement. Le capitaine réussi parfaitement la manœuvre. Nous sommes à quai, soulagés. Une partie du bassin est complètement gelé. Le printemps pointe son nez et le soleil illumine les glaciers environnants.



Dès le lendemain, nous profitons d’une occasion pour survoler en hélicoptère le glacier

Columbia. Le ciel est limpide. Nous gagnons en altitude et tels des oiseaux du grand large nous embouquons les vallées, sillonnons les canyons. Le géant et sa longue vallée glacière s’offrent à nous. Les crevasses dessinent une mosaïque de blanc et de bleu.


Il y a deux jours nous étions là, dans ce somptueux décor, avec notre petit bateau, nous avions bravé la tempête afin de nous approcher de son front. Aujourd’hui le vent est calme.



Le pilote pose son appareil sur une plage de galets sur laquelle la marée a déposé des

fragments de glacier. Ils sont là comme une œuvre d’art à la Buren. Glaçon blanc, glaçon noir. J’explique à Marion comment ce petit « growler » que l’on retrouve là hors de l’eau nous apparaît quand nous le croisons en mer. Seulement 1/7 de son volume émerge. On comprend mieux le danger que peut représenter ces petits bouts de glace s’ils percutent l’étrave de notre bateau. La mer monte et il nous faut décoller. Nous survolons Fleur Australe dans le nouveau port de Valdez. En 1964 Valdez fut l’une des villes les plus touchées par le tremblement de terre suivi d’un raz de marée qui frappa la côte, obligeant la ville à se déplacer vers un lieu plus sûr de la baie du Prince William Sound.


19H00, nous célébrons cette belle journée autour d’une bière, dans le bien sympathique bar du coin « Fat Mermaid ». Les écrans passent en boucle, les dernières infos concernant le Corona Virus, un premier cas vient d’être détecté en Alaska, les écoles sont fermées et les gens subissent la psychose surtout à la vue de Français, dans certains villages les gens nous chassent, nous interdisant de débarquer, certains ports sont fermés. Nous apprenons avec une infinie tristesse le confinement imposé en France après les autres pays et mesurons la chance que nous avons de vivre en famille sur notre bateau de 19 mètres dans les plus beaux coins de la planète. Profitez de ces instants chez vous, pour faire du temps un allié, pour jouir des vôtres si vous avez la chance d’être en famille, pour lire, écrire, cuisiner, ou tout simplement ne rien faire. C’est ainsi que nous vivons depuis plus de dix ans, en particulier pendant les longues traversées et ça m’a beaucoup nourri, croyez-moi.



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