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Photo du rédacteurGéraldine Danon

28 mars 2019 - Chirpoy island, les îles Kuriles

Mouillage de toute beauté !



Nous avons quitté notre belle baie sur l’île de Chikotan à la nuit venue. Le vent est portant jusqu’au prochain mouillage à 200 milles environ. Nous longeons deux grandes îles qui nous protègent de la houle du nord. La lune gibbeuse fait son apparition et vient nous tenir compagnie durant cette belle navigation. Nous guettons le ciel car des aurores boréales sont possibles. Les étoiles illuminent la sphère céleste et Orion, imposante, se dévoile en maître de la nuit.


La vitesse est bonne, la Fleur Australe galope vent arrière, génois tangonné et grand voile haute. Nous approchons des îles Chirpoy. Le jour se lève et les ombres se dessinent devant nous. Des îles massives, imposantes, coniques. Le Soleil apparaît à l’horizon, une boule orange émerge de la mer. Les îles enneigées se parent d’une robe pourpre qui s’enflamme au petit matin. Nous longeons la première et rasons la côte. Le capitaine en profite pour sonder les baies en vue d’un mouillage. Ici pas de guide, pas d’information sur les lieux. Philou veut faire le tour de Chirpoy, car les prévisions météo vont nous obliger à passer d’un côté à l’autre de l’île en fonction des vents forts. Ces îles qui ont émergé des profondeurs, réservent très peu d’endroits où poser l’ancre. Il faut donc sonder et repérer les abris possibles pour un éventuel mouillage nocturne. Au loin une autre île, une pyramide blanche posée sur la mer bleu indigo. Un léger nuage couronne son sommet, comme un chapeau. C’est beau !


Philou se rapproche d’une enclave entre un îlot et la côte. « Mouillage possible » s’exclame le capitaine, émerveillé par tant de beauté. « Les fonds sont bons, aux alentours de 10 mètres. » ajoute-t-il, satisfait. 


Nous embouquons le passage entre les deux îles. Un petit raz de courant agite la mer. Devant nous Chirpoy, la belle. Deux volcans actifs d’où jaillissent des panaches de fumée. Sur les pentes, des fumerolles dorées, indiquent une présence de souffre importante. Philou scrute aux jumelles les pentes de la montagne. Des coulées de lave, aux roches acérées dégringolent vers la mer. Mon capitaine profite pleinement de ce panorama magnifique. Pas question d’en louper une miette. Nous apprécions notre chance d’être là avec notre famille et notre bateau.


La côte défile et nous sommes submergés par les parois abruptes et les pentes neigeuses. Philou sonde encore la côte. Il sait qu’il devra venir mouiller à quelques mètres de ces falaises.



Nous contournons la dernière pointe avant de pénétrer dans une baie magnifique. Nous posons l’ancre, devant nous, trois sommets se dessinent dont deux sont des volcans actifs. 

Nous avons parcouru la planète, mouillé dans des endroits incroyables, mais celui-ci est sûrement l’un des plus beaux. La présence des volcans, de la neige, des coulées de lave, en font un lieu unique au monde.

Nos yeux pleurent d’émotion. Des oiseaux peuplent les falaises. Des pingouins, des cormorans et des goélands ont trouvé refuge sur les parois de basalte.

Le temps est avec nous, le Soleil brille et le vent est calme. Quelques pingouins s’envolent et virevoltent dans les airs, formant une ronde légère, la mer scintille sous la caresse du Soleil rasant. Nous partons explorer une autre baie. De loin, le terrain semblait propice à une promenade vers les fumerolles qui s’échappent de la Terre, mais la réalité est tout autre, car une fois escaladée la première paroi enneigée, nous devons traverser une coulée de lave. La neige qui recouvre cet enchevêtrement de rochers acérés, cache des failles profondes où nos jambes s’enfoncent. Lentement nous gagnons quelques mètres et recevons en pleine face, la chaleur qui sort des entrailles de la terre. Nous sommes sur un fleuve de roches volcaniques, une coulée de lave refroidie qui descend directement du volcan qui nous surplombe. Les enfants sautent d’un rocher à un autre, s’enfoncent dans les trous de neige. Je surveille mes petits cabris et je tremble de peur à chaque instant de leur progression hasardeuse. 


Arrivés en haut, nous découvrons devant nous, l’autre île Chirpoy, plus calme, moins agitée et sans doute endormie. Elle n’est pas moins belle avec son sommet pointu et ses pentes parfaites qui se jettent dans la mer. Le Soleil brille, nos cœurs s’enflamment devant tant de beauté.Nous en avons vu des paysages, des montagnes, des glaciers. Celui-ci nous fait vibrer. Nous nous emplissons de sa beauté.


Retour à bord. La météo n’est pas bonne pour les prochaines heures. Le vent forcit de Sud Est à 30 nœuds, et nous oblige à lever l’ancre en pleine nuit, dans une tempête de neige avec une mer qui se lève. Nous sommes contraints de contourner la pointe Est de l’île pour trouver refuge sous une falaise. Le capitaine navigue aux instruments, radar, carte électronique, sondeur et projecteur. Dans la nuit noire, avec une neige qui recouvre le bateau, nous mouillons à l’aveugle. A l’aube, nous refaisons chemin inverse dans une mer houleuse avec un vent qui souffle en rafales. Il faut trouver le meilleur endroit, ni trop de houle, ni trop de vent où l’ancre va pouvoir accrocher. Le pont est recouvert de neige, les enfants dessinent sur les hublots.


Nous vivons ce qui nous anime, ce que nous aimons, l’aventure et la beauté de notre planète. Nous sommes seuls, loin de la civilisation, loin de tout, mais heureux de partager ces moments forts.


Demain une tempête est annoncée, avec des vents à plus de 40 nœuds. L’ancre est bien crochée dans le sable noir du volcan.




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