D’îles en îles
- Géraldine Danon
- il y a 4 jours
- 3 min de lecture
Après le chantier effectué à Concarneau, nous avons fait voile pour contourner la Bretagne et découvrir quelques-unes des îles qui bordent ses côtes.

Première escale à l’île de Sein. Un affleurement de roches au raz des flots. Sur ces rochers, les marins ont construit au fil du temps quelques maisons de pêcheurs. Collées les unes aux autres, elles sont prêtes à encaisser les assauts des tempêtes et à se faire submerger par les vagues. Quelques petits jardins fleuris, des potagers pour accompagner la pêche du jour. Comme dans chaque île, une église dresse son clocher. On vient prier les marins disparus.

Un phare en noir et blanc trône à la pointe nord de l’île. Du haut de ses 50 mètres, il prévient de son éclat, les bateaux qui cherchent leur voie dans le raz de sein ou près de la chaussée sur laquelle brisent des centaines de récifs. À son extrémité, le phare d’Ar-Men, une vigie posée sur une tête d’épingle en granite. Il a fallu plusieurs années aux hommes pour sceller des broches dans ce rocher, aux plus basses mers, quelques heures, avant de rembarquer dans la chaloupe et qu’une lame vienne balayer le récif. À
force de ténacité, les maçons attachés à la roche, on réussit à coller avec un mortier spécial, les cailloux découpés sur l’île de Sein et déposés un par un, entre deux lames d’une houle traitresse. C’est le phare qui a demandé le plus de travail à la compagnie des Phares et balises. Encore plus au large, une bouée, « l’occidentale de Sein », gardienne de tous les écueils sur lesquels des dizaines de navires ont sombré, perdus dans la brume ou emportés par la tempête.

Fleur Australe, quille relevée, relâche au pied de la digue. A quelques mètres du bateau de la SNSM. Jadis, les hommes partaient à la rame, secourir les naufragés. Aujourd’hui, un « bateau tout temps » est capable d’affronter le pire au cœur de la tourmente. Les marins sont sur l’île, prêts à embarquer à la moindre alerte.
Les pêcheurs ont reconnu la Fleur. Ils ont du respect pour ce bateau et son équipage. Ils savent que cette coque a parcouru le monde, affronté les tempêtes et bousculé les glaces. Ils aiment sa fière allure et sa timonerie, ils reconnaissent là un « bateau tout temps ».
On se voit offrir de beaux homards qui font le bonheur de l’équipage.
Il n’y a plus de gardien au phare mais nous allons escalader les 249 marches nous conduisant au pied de la lentille de Fresnel qui de son faisceau, éclaire les flots environnants.
Cap au nord, vers le Conquet, port de pêche à l’entrée du chenal du Four. Ici aussi les pécheurs et le capitaine de la navette d’Ouessant nous saluent, ils ont reconnu l’oiseau du large qui vient mouiller dans leur port abri.
Molène, Ouessant, les sentinelles des terres bretonnes. Sauvages, brassées par les courants puissants. Le passage du Fromveur avec ses anges gardiens, le phare de Kéréon, la Jument, et sur l’île d’Ouessant, le phare du Stiff, celui de Créach. Ils sont les éclaireurs de l’entrée de la Manche.
Ici on surveille le trafic de centaines de cargos qui passent tous les jours et vont alimenter les ports d’Europe.

Nous débarquons, pour humer la lande bretonne, les ajoncs, le granite chauffé au soleil du printemps et admirer les cailloux du bout du monde, ou au moins de l’Europe.
Escale dans l’Aber Benoît. Nous faisons le plein de coquillage à Prat-Ar-Coum avant de retrouver nos amis Patrick et Nolwenn à Bréhat.
Cap vers la cité des corsaires pour faire le dernier plein de nourriture, la pharmacie et quelques bricoles indispensables à l’expédition vers le grand nord.
Nous poussons en terre normande, vers les îles Chausey. Un pêcheur nous fait remarquer que notre pavillon breton qui flotte aux haubans n’est pas le bon ! Le capitaine descend le « Gwen a Du » (blanc et noir).
Ici les marées changent le décor. Les bancs de sable apparaissent chapotés de roches et quelques heures plus tard, la mer reprend possession des lieux et dessine des tourbillons de courants.

La mer descend, l’eau s’en va, la Fleur se pose sur son lit de sable blanc, tenue par ses béquilles. Elle est fière dans ce jour naissant. Les petits poissons se faufilent dans les derniers ruisseaux, et les goélands viennent quérir quelques naufragés qui n’ont pas réussi à gagner la mer.
Jersey est à une poignée de milles, quelques heures seulement, pour trouver si proche, une terre anglaise.
L’équipage est au complet. Nous mettons cap vers la Cornouaille anglaise et les îles Scilly.
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