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  • Photo du rédacteurGéraldine Danon

Jeudi 11 avril 2019


Il nous a fallu attendre que les manœuvres de sous-marins soient terminées pour lever l’ancre et rejoindre le quai où nous attendaient les autorités. Une bonne dizaine d’hommes sont là derrière un cordon de sécurité qui délimite nos deux mondes. Celui des oiseaux du large que nous sommes, de celle de la civilisation et de ses règles drastiques. Les douaniers, l’immigration mais aussi les agents secrets du KGB nous attendent. Une fois les amarres lancées, nos hôtes se précipitent à bord. Difficile de distinguer les uns des autres mais nous repérons vite les plus inquisiteurs. On nous demande de visionner les images que j’ai tournées avec ma caméra. Méfiante, j’avais pourtant filmé l’arrivée de loin, mais nos agents ont l’œil et ils veulent voir les dernières images qu’ils m’obligent aussitôt à supprimer avant de bien vérifier qu’une fois à la poubelle, celles-ci soient vidées de façon définitive. Un peu parano nos russes !


La douanière est plutôt sympa, et les papiers sont vite expédiés. Pour l’immigration c’est un peu plus long mais très convivial. Nos agents secrets s’en vont sans nous lâcher un sourire, fonction oblige. Un homme discret est autorisé à monter sur le bateau, c’est Sergey Smirnoff, navigateur et agent qui a organisé notre arrivée avec les autorités. Yannick Martin, un français marié à une russe est là aussi pour nous accueillir et nous aider, il va gentiment nous servir de guide et de traducteur pour nos premiers pas en Russie.



Nous sommes autorisés à nous déplacer vers la marina. Ce n’est pas le port des Minimes à La Rochelle, une dizaine de bateaux, petits voiliers et embarcations à moteur sont encore au sec sur le quai. La saison n’a pas commencé. Un ponton coincé entre des gros chalutiers nous permet de nous amarrer entre les remorqueurs et les bateaux de pêche. Sur le quai, des bateaux en réparation. On découpe des tôles d’acier que l’on ressoude, on pique la rouille, on les repeint avant qu’ils ne reprennent la mer après un hivernage forcé. Pendant plusieurs mois, le port et la baie d’Avatcha sont en effet pris par les glaces. Ce n’est que fin avril que l’on remet les bateaux à l’eau. Alors l’activité reprend, la pêche et le tourisme dans la baie.

En raison de sa situation idéale face aux Etats Unis, l’Union Soviétique a fait de Petropavlovsk Kamchatski, une base de missiles balistiques et de sous-marins nucléaires.

Par conséquent la Péninsule fut interdite au tourisme étranger, et même russe, jusqu’en 1990. La ville compte aujourd’hui un peu plus de 170 000 personnes. Dans le reste du pays c’est la Taiga, selon la légende, il y aurait plus d’ours que d’habitants. L’activité principale est la pêche et la base militaire, depuis quelques années le tourisme se développe un peu. Les vieilles constructions datent des années 20. Un style austère auquel on essaie d’apporter un peu de gaîté avec des peintures de couleur.



Le cadre est superbe, la ville est dominée par deux mystérieux volcans, le Koryasky et ses 3456 mètres et son petit frère l’Avachinski de 2741 m qui dévoilent leur silhouette majestueuse quand le ciel s’éclaircit. La baie serait une ancienne caldeira. Au loin d’autres chaînes de montagnes, d’autres volcans de plus de 2000 mètres. Le Kamtchatka situé sur la ceinture de feu du Pacifique en compte 300 dont 99 actifs. C’est ici que l’on trouve la plus forte concentration de volcans actifs au monde.



Aujourd’hui nous partons à la découverte des vallées enneigées, les routes sont bordées de bouleaux, pas un conifère. Les arbres sont maigres et dénudés. Il a beaucoup neigé ces derniers jours, il faut un véhicule approprié avec de grosses roues pour emprunter les pistes. La route serpente le long de la rivière. Des pêcheurs sur le bord glacé du cours d’eau pêchent le saumon. Il y a une dizaine d’espèces différentes, c’est le paradis des passionnés de la canne à pêche. Nous grimpons jusqu’au flan de la montagne pour admirer une cascade gelée comme une stalactite géante qui s’échappe du volcan. Le mauvais temps des derniers jours a laissé place à un ciel limpide. Le Soleil caresse les cimes enneigées qui rosissent de plaisir quand le jour s’assoupit, il se glisse dans les forêts dessine des ombres sur les champs de neige éternelle qu’il drape de velours. Nous faisons escale pour la nuit dans un refuge, les amateurs de ski hors piste peuvent s’en donner à cœur joie. Déposés par hélicoptère ou moto neige ils ont un domaine entièrement vierge pour eux. Nous goûtons aux bains chauds des eaux sulfureuses venues des entrailles de la terre. Un croissant de Lune allume le ciel qui du bleu passe au noir.


C’est le grand calme, un repos bien mérité pour l’équipage.



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