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  • Photo du rédacteurGéraldine Danon

L’île Cathédrale

Nous relâchons à Ua Pou, l’île Cathédrale, au petit matin. Le soleil caresse les montagnes calcinées et le bois lolo prends des teintes rosées, l’île est aride, farouche, parsemée de quelques oasis verdoyantes. Elle est dominée par plusieurs pics de basalte qui forment une cathédrale naturelle dont « Pomaka » le plus célèbre de ces géants, qui alimente les légendes et fait la fierté de ses quelques 2000 habitants. Il serait parti combattre à Nuku Hiva avant de revenir se dresser en vainqueur dans le ciel de Ua pou.




C’est justement au cœur de la montagne, tout en haut de la vallée d’Hakaétau que nous avons décidé de nous rendre afin d’admirer le colosse au plus près et de se charger de son « mana » (force surnaturelle). Nous grimpons pendant plusieurs heures à flanc de montagne, le cirque est un des plus beaux qu’il m’ait été donné d’admirer et la spiritualité qui se dégage du lieu convertirait le plus grand des sceptiques en mystique convaincu. « La montagne est magique », me glisse Jackson notre guide marquisien à l’oreille tout en ouvrant le passage pour rendre notre ascension possible. Nous montons en silence, respectueux et bien conscients qu’il faut mériter de pouvoir s’approcher de cette colonne de basalte qui danse avec le ciel, conscients également, comme ne manque pas de nous le faire remarquer Jackson de la chance que nous avons de pouvoir l’admirer en entier, lui qui a si souvent la tête dans les nuages. Arrivés au terme de notre ascension, au pied du titan de 300 mètres, je l’enlace et me charge de sa force.

Je remplis mon escarcelle de son pouvoir sacré. L’âme du guerrier Marquisien qui a vaincu son adversaire par la ruse en utilisant son point faible, me parait toute proche et il me semble entendre son cœur battre. Entouré de ces colosses gigantesques, c’est le pouls de l’univers que je perçois, son rythme parfait, rassurant, à peine troublé par quelques chants d’oiseaux. « En redescendant nous allons faire une halte chez Manfred, le deuxième « mana » de la vallée, à la maison du chocolat » me susurre Jackson ». En effet au terme d’une interminable descente dans la vallée enchantée, nous arrivons chez Manfred, l’alchimiste chocolatier, sa femme Thérèse et les nombreux animaux qu’ils abritent dans leur ravissante propriété où tout pousse mais en particulier plusieurs espèces de cacao et du café. Manfred nous régale de toutes sortes de délicieuses douceurs chocolatées. Il concocte son chocolat dans son petit atelier rose et me fait penser à la miss Amélia de Carson Mac Cullers, qui détient le secret du whisky et qui ne le dévoilerait pour rien au monde. Les marquises ont bien des charmes, cette escale gourmande au pied de Pomaka, est la preuve incontestable de l’Esprit qui veille sur ces îles inspirées, aussi fortes que poétiques et sur ce peuple tellement vigoureux et sensible.



Les Marquises n’ont pas fini de nous étonner, chaque rayon de lumière laisse entrevoir une nouvelle facette de leur beauté infinie comme un éclat de mer sur la terre, c’est pour cela que le ciel ici parait si proche et que les nuages défilent si lentement. Nous regagnons le bord, comblés. Fleur Australe roule au grés de la grosse houle qui envahit la baie, nous hissons les voiles et mettons le cap dur Ua Huka, l’île aux chevaux.



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